Un palmarès, une personnalité, une réputation de mystique : Ivano Ghirardini invoque Dieu se dit fou et surfe sur les jours.
En dépassant mes limites, j'ai enfreint les lois de la nature... » Ainsi s'exprimait Ivan Ghirardini après une aventure solitaire de douze jours dans le Linceul en 1975. Pour ce fils d'immigrés italiens âgé de trente ans, l'alpinisme est un art qui exige créativité et audace: Trilogie de l'hiver 78 (trois faces nord en solo : Cervin, Jorasses, Eiger), Mitre Peak en solo, tentative solitaire hivernale au pilier ouest du Makalu. Individualisme et audace également dans ses orientations professionnelles : Yvan a ouvert une école d'alpinisme à Chamonix et fabrique sous son nom des équipements d'alpinisme.
Alpinisme et Randonnée : Pourquoi et quand la montagne ? Es-tu toujours motivé de la même manière ? Ivan Ghirardini : J'ignore ce qu'est la montagne pour un Français, mais pour un Italien, c'est avant tout de l'art. Comici, Gervassutti, Cassin, Bonatti, Cassarotto et même Messner sont des artistes. Motivé ? pourquoi faire ? l'art n'est pas une question de motivation.
Mode de vie, entraînement, régime, discipline de vie ?
Je le répète, l'art est très individualiste, sensitif, palpeur. Lors du Linceul, [ai jeté les cigarettes et la viande. Pour la Trilogie de 77/78, je suis allé prier Zeus sur le mont Olympe de m'exaucer et me protéger. Il faut sen¬tir et se bâtir son propre art de vivre, sans contraintes, saur celles que l'on se choisit mais ce n'en est pas car tout devient joie et plaisir.
Quelles sont tes opinions politiques, religieuses, ta philosophie ?
Faire le moins de tort possible à autrui et c'est déjà beaucoup. Je crois à un retour en force du Christianisme pur et primitif des premiers âges. Les océans vont frapper aux portes des villes. Les mains vont se lever. Les hommes voudront de nouveau tuer les chrétiens comme au début. Je crois au retour prochain du Christ. Lui seul est maître et roi.
Lesgens, les situations, les lectures qui t'ont le plus marqué?
Laskar Khan qui est mort dans mes bras au K2, des coups reçus par des gens à qui j'avais donné ma confiance et qui avaient appelé les gendarmes pour m'accuser de violence chez eux si je les avais rendus. Je n'aime pas la Bible, sauf le Nouveau Testament car ce n'est qu'un recueil d'assassinats, vols, mensonges, rapines et adultères, avec quelques pages très belles toutefois. J'aime « Guerre et Paix » de Tols¬toï, Thycidide, Homère, Racine...
Es-tu bien dans ton époque ? Dans ta peau ?
J'aime la Grèce antique. J'ai vu Delphes et Olympie et j'ai compris leur « art » de vivre. Bien dans ma peau ? Je ne sais pas car je suis fou, mais j'aime et ça me surfit. Je ne regrette rien, même mes pires bêtises. La vie passe, il faut glisser, surfer sur les jours, veiller, veiller sans cesse car notre petite loupiote va bientôt s'éteindre.
L'alpinisme aujourd'hui ? Demain ?
Je me fous de l'alpinisme mais chaque fois que je vois une montagne j'ai envie de faire comme Mahomet dans le désert, enlever mes chaussures et crier: « Merci Montagnes Divines, Merci pour votre infinie beauté Vous êtes les cathédrales que Dieu a bâties pour nous et vous escalader est notre prière. »
L'Himalaya ?
Une insulte contre les droits de l'homme. Payer pour une montagne c'est faire de ces déesses de jadis des putains à des milliers de dollars la passe. Le Népal, le Pakistan, l'Inde et la Chine ont trahi la conscience de leurs peuples, de ces gens qui jadis venaient de loin les prier et porter des offrandes. Grimper n'est pas salir. Louer, mettre des barrières ou des policiers pour contrôler l'accès c'est « Voler Dieu ». Les premiers responsables de cela sont les fédérations d'alpinisme et ensuite les grimpeurs professionnels qui dès le début ont voulu tricher en éliminant par des autorisations et des royalties toute concurrence. Se réserver une montagne, une voie pour trois mois ou une saison, voilà leur crime devant l'histoire en général et celle de l'alpinisme en particulier.
Pourquoi une école d'alpinisme ? Est-ce que ça marche ? Tes rapports avec les guides traditionnels?
J'ai été un des plus mauvais élèves de l'ENSA. J'ai failli me faire jeter deux fois et pourtant j'ai eu la bourse de la vocation. Je veux faire comme je sens, vois, pas m'intégrer à des structures. J'ai été heureux de faire la Walker sous la tempête avec un client alors que personne d'autre n'avait pu passer pendant un mois. C'était contraire à toute logique, prudence mais ça a fait et nous étions heureux.
Fabrication de matériel : comment, pourquoi, avec qui ?
C'est la même folie. Je ne supportais plus d'être conseiller technique. Pourtant de très grandes marques m'avaient engagé ou contacté : Lafuma, Eider, Galibier, Pipolaki, mais avant d'aller au Makalu ['ai tout laissé tomber. Je ne voulais pas devenir un homme sandwich. Le loup et le chien. Du jour au lendemain je me suis re¬trouvé sans rien mais libre et heureux, c était le maximum que l'on puisse demander. Pour le reste, il faut se retrousser les manches. Non pas travailler mais être actif. Ça marche très fort car nous avons la qualité à des prix imbattables et nous vendons directement.
Qu'est-ce qui te fait vivre ?
D'abord est-ce que je vis vraiment? Non, sûrement pas. Si la vie était en moi, je marcherais sur l'eau, je trouverais la porte et le chemin. « Tu étais la vie, Toi, qui marchais dans les déserts de Galilée et de Judée, soignant par la simple imposition des mains. Les foules voulaient te toucher. Nous ne te comprenions pas. Nous t'avons trahi et Toi tu nous as pardonnes, parce que jusqu'au bout tu nous a laissé notre Chance. Nous sommes indignes, mauvais, impurs et le comprendre c'est déjà se mettre en route pour te retrouver. Oh Toi, la lumière et la vie ! »
Alpinisme et Randonnée 64
En dépassant mes limites, j'ai enfreint les lois de la nature... » Ainsi s'exprimait Ivan Ghirardini après une aventure solitaire de douze jours dans le Linceul en 1975. Pour ce fils d'immigrés italiens âgé de trente ans, l'alpinisme est un art qui exige créativité et audace: Trilogie de l'hiver 78 (trois faces nord en solo : Cervin, Jorasses, Eiger), Mitre Peak en solo, tentative solitaire hivernale au pilier ouest du Makalu. Individualisme et audace également dans ses orientations professionnelles : Yvan a ouvert une école d'alpinisme à Chamonix et fabrique sous son nom des équipements d'alpinisme.
Alpinisme et Randonnée : Pourquoi et quand la montagne ? Es-tu toujours motivé de la même manière ? Ivan Ghirardini : J'ignore ce qu'est la montagne pour un Français, mais pour un Italien, c'est avant tout de l'art. Comici, Gervassutti, Cassin, Bonatti, Cassarotto et même Messner sont des artistes. Motivé ? pourquoi faire ? l'art n'est pas une question de motivation.
Mode de vie, entraînement, régime, discipline de vie ?
Je le répète, l'art est très individualiste, sensitif, palpeur. Lors du Linceul, [ai jeté les cigarettes et la viande. Pour la Trilogie de 77/78, je suis allé prier Zeus sur le mont Olympe de m'exaucer et me protéger. Il faut sen¬tir et se bâtir son propre art de vivre, sans contraintes, saur celles que l'on se choisit mais ce n'en est pas car tout devient joie et plaisir.
Quelles sont tes opinions politiques, religieuses, ta philosophie ?
Faire le moins de tort possible à autrui et c'est déjà beaucoup. Je crois à un retour en force du Christianisme pur et primitif des premiers âges. Les océans vont frapper aux portes des villes. Les mains vont se lever. Les hommes voudront de nouveau tuer les chrétiens comme au début. Je crois au retour prochain du Christ. Lui seul est maître et roi.
Lesgens, les situations, les lectures qui t'ont le plus marqué?
Laskar Khan qui est mort dans mes bras au K2, des coups reçus par des gens à qui j'avais donné ma confiance et qui avaient appelé les gendarmes pour m'accuser de violence chez eux si je les avais rendus. Je n'aime pas la Bible, sauf le Nouveau Testament car ce n'est qu'un recueil d'assassinats, vols, mensonges, rapines et adultères, avec quelques pages très belles toutefois. J'aime « Guerre et Paix » de Tols¬toï, Thycidide, Homère, Racine...
Es-tu bien dans ton époque ? Dans ta peau ?
J'aime la Grèce antique. J'ai vu Delphes et Olympie et j'ai compris leur « art » de vivre. Bien dans ma peau ? Je ne sais pas car je suis fou, mais j'aime et ça me surfit. Je ne regrette rien, même mes pires bêtises. La vie passe, il faut glisser, surfer sur les jours, veiller, veiller sans cesse car notre petite loupiote va bientôt s'éteindre.
L'alpinisme aujourd'hui ? Demain ?
Je me fous de l'alpinisme mais chaque fois que je vois une montagne j'ai envie de faire comme Mahomet dans le désert, enlever mes chaussures et crier: « Merci Montagnes Divines, Merci pour votre infinie beauté Vous êtes les cathédrales que Dieu a bâties pour nous et vous escalader est notre prière. »
L'Himalaya ?
Une insulte contre les droits de l'homme. Payer pour une montagne c'est faire de ces déesses de jadis des putains à des milliers de dollars la passe. Le Népal, le Pakistan, l'Inde et la Chine ont trahi la conscience de leurs peuples, de ces gens qui jadis venaient de loin les prier et porter des offrandes. Grimper n'est pas salir. Louer, mettre des barrières ou des policiers pour contrôler l'accès c'est « Voler Dieu ». Les premiers responsables de cela sont les fédérations d'alpinisme et ensuite les grimpeurs professionnels qui dès le début ont voulu tricher en éliminant par des autorisations et des royalties toute concurrence. Se réserver une montagne, une voie pour trois mois ou une saison, voilà leur crime devant l'histoire en général et celle de l'alpinisme en particulier.
Pourquoi une école d'alpinisme ? Est-ce que ça marche ? Tes rapports avec les guides traditionnels?
J'ai été un des plus mauvais élèves de l'ENSA. J'ai failli me faire jeter deux fois et pourtant j'ai eu la bourse de la vocation. Je veux faire comme je sens, vois, pas m'intégrer à des structures. J'ai été heureux de faire la Walker sous la tempête avec un client alors que personne d'autre n'avait pu passer pendant un mois. C'était contraire à toute logique, prudence mais ça a fait et nous étions heureux.
Fabrication de matériel : comment, pourquoi, avec qui ?
C'est la même folie. Je ne supportais plus d'être conseiller technique. Pourtant de très grandes marques m'avaient engagé ou contacté : Lafuma, Eider, Galibier, Pipolaki, mais avant d'aller au Makalu ['ai tout laissé tomber. Je ne voulais pas devenir un homme sandwich. Le loup et le chien. Du jour au lendemain je me suis re¬trouvé sans rien mais libre et heureux, c était le maximum que l'on puisse demander. Pour le reste, il faut se retrousser les manches. Non pas travailler mais être actif. Ça marche très fort car nous avons la qualité à des prix imbattables et nous vendons directement.
Qu'est-ce qui te fait vivre ?
D'abord est-ce que je vis vraiment? Non, sûrement pas. Si la vie était en moi, je marcherais sur l'eau, je trouverais la porte et le chemin. « Tu étais la vie, Toi, qui marchais dans les déserts de Galilée et de Judée, soignant par la simple imposition des mains. Les foules voulaient te toucher. Nous ne te comprenions pas. Nous t'avons trahi et Toi tu nous as pardonnes, parce que jusqu'au bout tu nous a laissé notre Chance. Nous sommes indignes, mauvais, impurs et le comprendre c'est déjà se mettre en route pour te retrouver. Oh Toi, la lumière et la vie ! »
Alpinisme et Randonnée 64