dimanche, novembre 08, 2009

Ivano Ghirardini, première en solo de la face sud de l'Aconcagua


PREMIERE « DIRECTISSIME » EN SOLITAIRE ET EN TECHNIQUE ALPINE DE L'ACONCAGUA REUSSIE PAR IVANO GHIRARDINI
Chamonix. — Une nouvelle fois, un alpiniste français vient d'inscrire son nom au palmarès de la conquête de l'Aconcagua par la face sud : il s'agit d'Ivano Ghirardini qui, il y a quelques semaines, a réussi la première directissime en solitaire et en {technique alpine de cette face. En 1974, le célèbre alpiniste Reinhold Messner avait réussi la premiè¬re directissime en question mais il avait été accompagné par deux alpinistes dans une partie de l'as¬cension et il n'avait pas utilisé le style alpin.
Ghirardini était parti avec Michel et André Verney de Bourg-d'Oisans pour ouvrir une nouvelle voie au pic Sud de l'Aconcagua (6 929 m). Les altitudes sont imprécises car le nivau de la mer qui sert de référence n'est pas le même, selon que l'on mesure du côté pacifique ou du côté Atlantique. Mais les deux dauphinois victimes du mal des montagnes n'ont pu quitter le camp de base. Le guide Ghirardini a donc tenté seul cette ascension et le 20 janvier, après 750m de paroi et deux bivouacs, il a dû abandonner afin de ne pas se couper la voie de retraite en cas de danger. C'est un peu le même problème qu'à l'Eiger avec la traversée -interstossier. Le 31 il s'est donc attaqué à la voie dite des Français ouverte en 1954, par une expédition dirigée par René Ferlet et comprenant notamment Paragot et Berardini, expédition traditionnelle qui avait équipée jusqu'au camp 2 à 5 800 m la voie de cordes fixes puis avaient terminé la partie supérieure en technique alpine. Cela avait pris 7 jours d'ascension réelle.
Messner lui avait suivi la même voie jusqu'au glacier supérieur puis ou¬vert la directissime en solitaire dans la partie supérieure, mais le reste avait été fait dans le cadre d'une expédition traditionnelle. La première en technique alpine a été réalisée par deux Américains en janvier dernier mais ils ne sont pas sortis au sommet, deux Japonais ensuite ont- réussi la variante en style alpin par le sommet nord. Pour Yvan Ghirardini ce fut la 12e ascension jusqu'au sommet, la troi¬sième en technique alpine (sans camp ni cordes fixes) et la première en solitaire intégrale dans ce style. Les spécialistes s'y retrouveront car cela est bien hermétique aux profanes, Disons qu'il a réussi à combiner les deux. plus grandes difficultés du moment ce qui repré¬sente un engagement maximum. Cette ascension s'est déroulée du 31 janvier au 3 février.
Parti de 4 000 n\d'altitude il a réussi dans la première journée l'ascen¬sion de 2 000 m de dénivelle le long de l'arête avec des passages en 5* et 6" ail-niveau des Grandes Tours sans jamais être assuré. Il a installé son premier bivouac à 6 000 m en haut du névé médian. Le 1 er février il s'est attaqué aux barres rocheuses très compactes, très difficiles à franchir car il était presque impossi¬ble d'y planter un piton. Le sommet de la barrière de sérac verticale a été franchie grâce à un tunnel de 40 m, par une grotte naturelle qui est un peu un escalier en colimaçon. Ensuite, il a progressé sur le glacier supérieur, très enneigé et a bivoua¬qué à 6 300 m.
Le lendemain, il a attaqué la partie supérieure ouverte par Messner, secteur où se situent les principales difficultés techniques avec des passages  sur des pentes raides et avalancheuses présentant un danger certain et un engagement maximum pente dans ce secteur varie entre 60 et 65°, Yvan Ghirardini pouvait* sortir aussitôt au sommet mais la tempête et le vent violent l'ont incité à bivouaquer à 6 850 m, sous l'arête.
C'est donc le 3 février vers midi qu'il atteint le sommet nord où se trouvait Jean-Marc Boivin qui attendait de¬puis plusieurs jours les bonnes conditions pour réaliser la descente en aile volante, exploit qu'il a réussi peu après.
Pour Yvan Ghirardini, le spécialiste des escalades de hautes difficultés solitaires c'est une nouvelle première à ajouter à un palmarès déjà brillant : c'est lui qui a résolu les trois grands derniers problèmes des Alpes il y a deux ans en réussissant dans la même saison les premières ascensions hivernales et solitaires de la face nord du Cervin de l'éperon Croz aux Grandes Jorasses, de la face nord de l'Eiger. Il était membre de l'expédition au K 2 et il a réussi l'été dernier la première solitaire du Mitre Peak au Pakistan. Maintenant, son objectif est de réussir en Himalaya ce qu'il a fait dans les Alpes : des ascensions i solitaires très légères, très difficile techniquement mais en style alpin : la   concentration   de   toutes,  lés difficultés sur un seul homme.
Jean-Paul ROUDIER.